La Suisse est un véritable laboratoire religieux. La plupart des religions du monde y sont représentées. Aujourd’hui, le pays compte 491 groupes religieux. Une formidable diversité, qui recèle des risques, mais aussi des chances. Dans un livre qui va paraître prochainement, une vingtaine de chercheurs exposent les enjeux – politiques, culturels, sociaux, juridiques, médiatiques, etc. – de cette pluralité.
Par exemple, celle de l’islam. Dans l’esprit du public, les musulmans forment une communauté monolithique. Or, il n’en est rien. «Les musulmans de Suisse n’affichent aucune unité culturelle, ethnique ou linguistique», remarquent les auteurs. Ce sont les attentats contre les tours du World Trade Center en 2001 qui ont mis en valeur l’appartenance religieuse des membres de ces différentes communautés. Pourtant, selon les auteurs, «c’est surtout le sentiment d’appartenance à une ethnie qui forge leur identité». Malgré leur diversité, les communautés musulmanes de Suisse ont cependant des revendications communes (port du voile à l’école, constructions de minarets, etc.) qui entraînent des craintes et même des conflits. «L’acceptation et l’intégration de l’islam au sein de la société suisse ne sont pas encore acquises», soulignent les chercheurs.
Les problématiques liées à l’islam ont d’ailleurs totalement éclipsé l’intérêt porté aux sectes. Les «nouvelles communautés religieuses» (NCR), comme les appellent les auteurs, ont fait beaucoup parler d’elles au moment des crimes commis au sein de l’Ordre du Temple solaire. Depuis, le débat soulevé par ces communautés, dont le nombre est incertain (100 à 200) et qui représentent environ 1,5% de la population, s’est fortement essoufflé. De plus, «nombreuses sont les NCR qui observent une stagnation, voire un recul, du nombre de leurs membres, constatent les auteurs. Cette évolution provient notamment des désaffiliations, du faible nombre de naissances ou de l’échec de la socialisation à l’intérieur des communautés.
Cependant, les Suisses manifestent un intérêt croissant pour la religiosité non organisée et les spiritualités ésotériques et alternatives. Ainsi, 33% d’entre eux croient à la réincarnation, 35 à 45% approuvent le parareligieux, comme les croyances aux guérisons miraculeuses, aux porte-bonheur, à la prédiction de l’avenir, 30% considèrent le spiritisme comme vraisemblable, et 30% croient à l’existence des extraterrestres. «L’idée ésotérique selon laquelle il existe une source et une vérité sous-jacente communes à toutes les religions est soutenue, du moins indirectement, par 52,8% des Suisses», remarquent les chercheurs. (Le Temps 11/04/ 2009).