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L'actualité du capital social, de la vie en société et des options de société.

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– La fusion des bourses: l’intégration hasardeuse du capitalisme international

stock exchangeLes bienfaits supposés du capital unique

Fusionner avec le NYSE va donner une plus grande visibilité aux entreprises cotées sur Euronext : les investisseurs anglo-saxons et asiatiques, qui connaissent la marque NYSE, seront plus sensibles à ces valeurs. La liquidité sur Euronext devrait aussi augmenter. Actuellement, très peu de membres du NYSE sont aussi membres d’Euronext, et réciproquement. Par ailleurs, Euronext et le NYSE partageant les mêmes outils informatiques de négociation, les arbitragistes pourront intervenir sur les deux marchés en parallèle. La présence accrue à Paris de ces acteurs importants va accroître, pour les investisseurs, les chances de trouver des contreparties au meilleur prix pour leurs offres de vente ou d’achat. Rester isolés nous fait courir le risque d’être marginalisés. Aujourd’hui, nous avons la chance de signer un accord à parité avec le NYSE. Si nous laissons passer cette opportunité, dans deux ou trois ans, des réseaux de Bourses globaux, implantés aux Etats-Unis, en Asie et en Europe seront apparus. Nous risquons aussi d’être concurrencés par des plates-formes alternatives mises en place par des banques. Il nous faut absolument atteindre une taille critique pour continuer à abaisser nos coûts et à attirer des clients, donc de la liquidité. (Euronext12 /2006)

Il est surprenant que la constitution d’une énorme entité boursière transatlantique soit justifiée par les protagonistes d’une façon entièrement plate et technique, comme s’il ne s’agissait que d’une entreprise comme les autres, avec ses marges, ses coûts, ses dividendes… par, aussi, le recours à l’habituelle rhétorique d’entreprise suivant laquelle "nous" sommes en guerre, il faut "grandir" et ne pas se laisser "marginaliser". On en sait pas beaucoup plus après avoir entendu cela qu’avant.

Il y a pourtant bien quelque part "quelqu’un" qui suppute, évalue, oriente, inspire et décide. Un intérêt qui cherche à s’étendre ou à se conforter. On peut penser que cette opération révèle un certain affolement du capitalisme français (c’est-à-dire d’un groupe de gens) qui lutte pour ses positions sans s’embarrasser de principes ni de projet de société.

La Bourse n’est pas une entreprise comme les autres. Elle contribue au financement des entreprises, et donc au fonctionnement de l’économie. Une fusion internationale d’acteurs de marchés ne se réduit pas à des économies de frais informatiques dans l’intérêt limité de leurs actionnaires. Elle comporte des conséquences potentielles de long terme pour toute l’économie et pour la société.

Et pourtant, il y a une atonie profonde de la réflexion et du débat sur ce sujet – tant dans les mondes économique et politique qu’académique. La plupart des entreprises cotées, très partagées, sont restées inertes. Les seules réactions politiques étaient en termes de patriotisme économique ou de camouflet à l’intégration étatique européenne. Quant aux économistes, ils ont généralement repris le discours pseudo-rationnel sur les avantages techniques de la fusion.

On peut toutefois penser que les conséquences à long terme de cette fusion ne seront pas que positives. Par exemple, le fait que les entreprises soient cotées sur un marché transatlantique unique pourrait favoriser une propagation encore plus rapide des risques économiques. Quelles que soient les précautions qui ont été prises, le modèle américain de comptabilité et de gouvernance deviendra probablement une référence encore plus influente. Or ce modèle est orienté sur la profitabilité à court terme, ce qui incite à des coupes dans l’emploi et l’investissement.

Cela handicaperait encore l’émergence d’un modèle de capitalisme social en Europe.

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